Marie-Laure Laustriat
Le monde parallèle des homophones (censé / sensé)
Dernière mise à jour : 17 mars 2021
"Mais enfin Jérémy, c'est insensé ! Vous étiez censé me rendre ce rapport le 31 février et je ne l'ai toujours pas !"

Sensé / Censé
Deux mots très souvent confondus donc mal orthographiés. Pourtant, ils n'ont pas du tout la même signification ni la même racine.
- Sensé : vient du mot "sens" = quelque chose qui a du sens. Contraire : insensé = quelque chose qui n'a pas de sens.
"Je trouve votre remarque très sensée" = votre remarque a du sens (elle est intelligente et pertinente)
"Les reproches de Paul sont insensés" = Les reproches de Paul n'ont pas de sens (Paul dit n'importe quoi)
- Censé* : toujours suivi d'un verbe à l'infinitif. Synonyme = supposé. Par extension = devoir faire quelque chose.
Être censé faire quelque chose :
"Ce nouvel objet est censé nous faciliter la vie" = il est supposé nous faciliter la vie. il doit nous faciliter la vie. C'est son rôle.
"Les mesures sanitaires sont censées éradiquer le virus" = ces mesures sont supposées éradiquer le virus. Elles sont faites pour ça.
Mais cela ne veut pas dire que ça marche à tous les coups ! Exemples :
"Ce placement financier est censé nous rapporter une fortune."
= Il nous a été présenté comme tel, mais ce n'est pas sûr.
"Je suis censée arriver à 20 h à la gare."
= C'est l'heure théorique de l'arrivée de mon train, mais la SNCF peut en décider autrement... ou je peux aussi louper mon train !
Et le très fameux : "Nul n'est censé ignorer la loi". Tout le monde est supposé connaître toutes les lois, vaste programme ! 😁

Moyen mnémotechnique pour s'en souvenir :
Il faut justement s'appuyer sur le SENS de la phrase.
- Tout ce qui concerne le sens, le bon sens, commence par S. Pour en être sûr, il faut remplacer "sensé" par son contraire : insensé. Si ça marche, c'est S.
Voilà une décision sensée / voilà une décision insensée
- Si cela n'a rien à voir avec le sens ou le bon sens, ça commence par C. Et toujours suivi d'un verbe à l'infinitif.
* Cens. Au Moyen Âge, dans le système féodal, le cens était un impôt que le vassal devait payer à son seigneur en raison d'un bien que celui-ci lui avait remis pour y travailler et vivre.
Ce mot a donné le suffrage censitaire (seuls ceux qui payaient le cens avaient le droit de voter), qui bien sûr n'a plus cours de nos jours.
Être censé faire quelque chose : c'est donc un peu comme un impôt, c'est quelque chose que l'on doit à quelqu'un (ou à soi-même !), quelque chose qu'on a le devoir de faire.